Rues du Développement Durable (RDD), une association montée par une dizaine de membres (chacun-e ayant apporté un capital minimum au lancement), s’est décidée à contacter les propriétaires pour en finir avec ces locaux semi-abandonnés. Ils négocient des baux à moindre prix en promettant de prendre en charge les travaux par de l’autorénovation ou des chantiers de bénévoles. 8 locaux en ont bénéficié depuis 2012 ! Selon RDD, « on ne peut pas continuer à être clandest ins pour régler les problèmes fondamentaux de notre société » [1]... Mais cette démarche a ses limites : tout d’abord, elle concerne uniquement les locaux commerciaux ; deuxièmement, elle se heurte à la logique business des agences ou des foncières. Prenons l’exemple des anciens locaux de l’association Actis : ils appartiennent à une foncière parisienne qui a fait l’objet d’une OPA [2] et qui a oublié qu’elle avait ces locaux dans son portefeuille. Ce sont 300 m², trois étages, en plein centre. Aucun bail ne peut être négocié, la ville ne s’en préoccupe pas, et en attendant il y a toujours des personnes qui dorment dehors.
Autre événement troublant : au quartier d’affaires, dans la montée de la fameuse rue Ferdinand, une façade d’immeuble s’écroule subitement pour cause d’insalubrité. C. Dellara, conseiller municipal chargé de la sécurité publique et référent du quartier de Châteaucreux, nous explique que selon la loi, c’est la faute aux propriétaires du bien ; or ils sont introuvables pour le moment… En attendant qu’une procédure soit engagée, c’est donc la municipalité qui paye les frais de démolition. Mais l’EPASE est bien embêtée ! Elle a déjà assez de travail comme ça avec des constructions à tour de bras, à 200 mètres en contrebas...
Finalement, les propriétaires n’ont qu’à s’occuper de leurs biens. Mais le marché n’est pas très incitatif : la taxe sur les logements vacants (TLV), fixée par décret, ne s’applique pas à Saint-Étienne car ici le marché de l’immobilier n’est pas assez florissant — trop d’offres de logement pour pas assez de demandes [3]. On continue pourtant de construire, à des prix qui ne correspondent pas au marché actuel. Prenons l’exemple des résidences étudiantes, qui proposent des chambres neuves de 20 m² à plus de 400 euros, eau, gaz et électricité non inclus [4] pour des étudiants fraîchement arrivés dans la région. Étonnant que les vieux appartements du centre-ville ne soient pas loués.
La situation est donc bien bouchée : soit les propriétaires ne trouvent pas preneur, soit ils ont déjà oublié qu’ils avaient un immeuble sur Saint-Étienne. Et, parole d’élu, les investisseurs privés (pour ne pas nommer Vinci ou Eiffage) ne s’intéressent pas à ces immeubles. Eux sont intéressés par les friches pour construire, notamment car cela revient moins cher que de rénover. L’EPASE, financée en grande partie par l’État, préfère donc démolir et vendre les terrains aux grosses entreprises de BTP.
Quant aux maîtres d’œuvre, ce sont en majorité des cabinets d’architectes parisiens qui emportent les appels d’offres. Où est le « quartier créatif » stéphanois prôné par la municipalité ? Vinci par exemple, travaille avec le cabinet Emmanuel Combarel Dominique Marrec Architectes (ecdm) pour l’îlot Poste-Weiss en face de la gare. Les résultats de ces assemblages entrepreneuriaux aboutissent à des prestations légèrement déconnectées des réalités du terrain (suffit de regarder le paysage), voire fantaisistes (600 places de parking créées à Châteaucreux [5] ? En prévision de la construction de l’A45... Peut-être). Il faut savoir que la « préférence locale » est interdite par la loi dans l’attribution des marchés publics, et ceci au risque d’annuler le contrat, car elle est considérée comme discriminante envers les autres entreprises — néanmoins, un critère de « connaissance de l’environnement local » peut être pris en compte pour faciliter l’accès au marché aux entreprises locales [6]
En tout cas, les cahiers des charges auxquels doivent répondre les entreprises sélectionnées semblent illusoires à souhait. Hier, avec le centre commercial « Le Century » — où était installée la FNAC jusqu’à présent — Dubanchet espérait « donner le coup d’envoi » de « l’Europe commerciale » en Rhône-Alpes [7]. Aujourd’hui, aux yeux de Perdriau, c’est le centre commercial Steel qui incarne l’avenir. Et demain ??
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