Actualité et mémoire des luttes à Saint-Étienne et ailleurs
MÉMOIRE ANARCHISME / MOUVEMENT OUVRIER
ESPAGNE  
Publié le 20 juillet 2020 | Maj le 13 décembre 2020

Décès de Lucio Urtubia, maçon et anarchiste


Lucio Urtubia est décédé le 18 juillet à Paris à l’âge de 89 ans. Après avoir fui le franquisme, ce militant libertaire, maçon le jour, a consacré ses nuits et week-ends à confectionner des faux papiers et documents bancaires pour aider les peuples opprimés, devenant ainsi l’un des plus grands faussaires du XXe siècle. Lucio avait eu l’occasion de passer par Saint-Étienne en 2013, dans le cadre du festival Quartiers libres.

Lucio Urtubia nous a quittés cette nuit, le 18 juillet 2020, laissant une trace révolutionnaire qui accompagnera tous nos combats.

Lucio se définissait comme « anarchiste et maçon ».

Lucio est né en Navarre en 1931. Il a été marqué très jeune par la pauvreté et la répression du régime franquiste. Antifasciste de la première heure, il s’exile en France en 1954 et s’engage auprès des jeunesses libertaires. Sa rencontre avec Quico Sabate, maquisard résistant à Franco, a donné un tournant à sa vie militante. Créant des imprimeries à Paris, Lucio organise la lutte en s’attaquant aux puissances financières.
La redistribution des richesses, Lucio en a fait une réalité très concrète mettant par exemple à genou la First National City Bank.

« Quel plaisir d’exproprier, pas pour soi mais pour subventionner une grève, pour des imprimeries, pour faire des faux papiers... ». « Quel plaisir, quel orgueil de donner des papiers à quelqu’un qui pourra fuir la dictature et retrouver la liberté. »

Sur les traces de Louise Michel, Lucio répétait sans relâche que le pouvoir corrompt, qu’il ne faut rien attendre de l’État et du gouvernement.
Lucio luttait contre le capitalisme et son monde qui enferme, il s’est toujours battu contre les prisons, il aimait souvent dire « la prison même pas pour mon pire ennemi ! ».

Jusqu’à son dernier souffle il a déployé toute son énergie pour la libération des prisonnières et des prisonniers politiques.

En 1997, Lucio crée l’Espace Louise Michel - Sustraiak (racines en basque) rue des Cascades dans le 20e arrondissement de Paris. Il en fait un lieu d’accueil pour les luttes anti-impérialistes, sociales, syndicales, anti-carcérales qui hébergera nombre de réunions, d’expositions et d’activités. Un lieu aussi ouvert aux artistes engagés.

Nous saluons avec beaucoup d’émotion la mémoire d’un camarade, d’un compagnon de lutte qui vivra longtemps dans nos mémoires.

Secrétariat international de la CNT-f

Publié sur le site de Mille-babords

À lire également cet article qui lui est consacré sur Médiapart

Le « bon bandit » Lucio Urtubia est mort

Lucio Urtubia est décédé le 18 juillet à Paris à l’âge de 89 ans. Après avoir fui le franquisme, ce militant libertaire, maçon le jour, a consacré ses nuits et week-end à confectionner des faux papiers et documents bancaires pour aider les peuples opprimés.

L’un des plus grands faussaires du XXe siècle, le militant révolutionnaire Lucio Urtubia est décédé, le 18 juillet 2020 à Paris, à l’âge de 89 ans, laissant derrière lui une vie épique d’engagements dans la défense des peuples opprimés. Ses obsèques se tiendront vendredi 24 juillet, au cimentière du Père Lachaise.

Après avoir fui, en 1954, l’Espagne franquiste où il avait été condamné aux travaux forcés, Lucio Urtubia, né en Navarre dans une famille modeste, s’est spécialisé dans la confection de faux documents en tous genres, des papiers d’identité, des chèques ou même des billets de banque pour aider de nombreuses causes révolutionnaires, sans en tirer un profit personnel. Ce qui lui vaudra une réputation mondiale, adossée aux surnoms de « bon bandit » ou de « Zorro basque ». Des documentaristes, biographes et auteurs de BD ont retracé les combats de ce « Robin des bois des temps modernes ».

Ouvrier carreleur, Lucio Urtubia, qui a toujours souhaité continuer à travailler, s’adonnait à ses missions clandestines le soir et le week-end. Compagnon de route de « Quico Sabaté », militant anarchiste assassiné en 1960, des mouvements de libération nationale et de décolonisation, il côtoya aussi Eldridge Cleaver, leader des Black Panthers, Albert Camus ou encore Henri Cartier Bresson.

En 1962, c’est Ernesto Guevara qui vient le rencontrer dans un salon de l’aéroport d’Orly. Lucio a un projet à proposer à celui qui est alors ministre de l’Industrie à Cuba : le faussaire veut « inonder le monde de milliers de faux dollars pour financer la révolution et ruiner l’Amérique ». Le Che repart à la Havane avec des échantillons de faux billets, mais renonce finalement au projet.

Huit ans plus tard, Lucio Urtubia se fait arrêter alors qu’il réalise son plus gros coup d’éclat : la reproduction de milliers de chèques pré-imprimés (traveller’s) de la First National City Bank. Le butin est évalué à près de 20 millions de dollars.

Incarcéré pendant six mois, Lucio Urtubia entame des négociations, avec son avocat Roland Dumas, avec la banque américaine. Il finit par trouver un accord, en échange du retrait de la plainte. « Je leur ai donné les plaques d’imprimerie et ma parole que je ne copierais plus leurs chèques. Mais contre une somme d’argent pour le mouvement », expliquera-t-il plusieurs années plus tard.

Ses activités illégales lui vaudront d’autres séjours en prison. En 1974, Lucio Urtubia avait déjà été arrêté après avoir été accusé, avec son épouse Anne Granier, de complicité dans l’enlèvement de Balthazar Suarez, représentant de la Banque de Bilbao à Paris. Il fut incarcéré à la prison de la Santé quelques mois avant d’être acquitté lors du procès en 1981. En 1976, Urtubia est aussi assigné à résidence pendant cinq jours à Belle-Ile-en-Mer, en compagnie d’autres anarchistes et indépendantistes basques, à l’occasion de la venue du roi d’Espagne Juan Carlos en visite officielle en France.

De ses séjours en prison, le militant conservait une profonde révulsion de tout système carcéral. Malgré le poids des années, Lucio Urtubia a continué à aider, jusqu’aux derniers instants de sa vie, de nombreuses familles de détenus depuis l’espace « Louise Michel » qu’il a fondé à Paris en 1997.

Sa biographie dans le « Maitron » est consultable ici.
Lucio Urtubia a aussi publié son autobiographie, Ma morale anarchiste (Les Éditions libertaires), en 2005.
Un documentaire retraçant sa vie, « Lucio », est sorti en 2007.

L’engagement militant de Lucio Urtubio fait écho à celui d’un autre grand faussaire ayant exercé au XXe siècle, Adolfo Kaminsky (lire ce billet de blog sur l’exposition que lui a consacrée le musée d’art et d’histoire juive en 2019). Engagé dans la Résistance à dix-sept ans, Kaminsky, passionné de chimie, a travaillé pour la résistance juive, les ­services secrets de l’armée française jusqu’en 1945, avant de faire des faux papiers pour les indépendantistes algériens, des révolutionnaires d’Amérique du Sud et des mouvements de libération du Tiers-Monde, ainsi que des opposants aux dictatures de l’Espagne, du Portugal et ­de­ la­ Grèce.


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