L’industrie, les hôpitaux, les hypermarchés (Steel ?) et immeubles du tertiaire constituent 0,1 % des raccordés à l’électricité et consomment à eux seuls 40 % de la production (Le capital).
Les PME et activités libérales représentent 13,2 % des raccordés et consomment 23 % de la production (La survivance de l’artisanat).
Plus de 86 % des abonnés se partagent les 37 % restants (Le travailleur).
Quand ces 86 % vivent à Saint-Étienne, sur un sous-sol truffé de charbon qui fit le bonheur des compagnies minières, tout près de grands barrages hydro-électriques (et dont l’un, le Gouffre d’enfer, déteint en son temps, vers 1860, le record du monde de hauteur) ainsi que de la décharge de Roche la Molière qui produit de l’électricité à partir du biogaz des déchets ménagers, est-il acceptable de manquer d’énergie ? D’autant que cette production locale d’énergie est déjà source de nuisances : nombreux mineurs exténués par l’exploitation, retenues d’eau polluées et barrées aux migrateurs, odeurs nauséabondes quasi-permanentes jusqu’à des kilomètres à la ronde. On propose ici deux voies pour échapper au manque – l’une est locale et applicable partout, l’autre est nationale.
Une lutte dans la lutte des classes
7 abonnés sur 10 sont attachés au tarif unique. Avec plus de trente millions d’abonnés, cela ferait au moins 18 millions qui pourraient faire savoir leur attachement haut et clair en signant cette pétition : https://energie-publique.fr/ [1].
À partir du moment où le contrôle est centralisé, que ce soit dans les mains des monopoles ou des états, il est dans l’intérêt du capital de fragmenter le travail, ses moyens et surtout son organisation. Cette fragmentation crée des occasions d’échanges marchands et de détournements vers les profits financiers. L’éclatement d’un moyen collectif et commun de production d’électricité laisse augurer de mirobolantes prises de profits, surtout quand l’électricité, soit-disant vitale, est à ce point mise en avant. « Croissance verte », « véhicule propre », « confort domestique », « outils numériques et objets connectés », etc. constituent autant de mirages laissant imaginer à l’individu qu’il s’extraie de la masse et brille alors qu’il n’a aucun contrôle, individuel ou collectif, des moyens de sa brillance.
La lutte des classes commence toujours et chaque fois que l’espèce dominante accapare les conquêtes sociales ou politiques précédentes pour son seul profit particulier. La banalisation du recours au numérique rebat les cartes, elle apporte à la fois confort (apparent !) et contrôle à distance des rapports humains. Mais quoi qu’il en soit, la lutte des classes a permis des conquêtes à ne pas perdre.
Contre la précarité énergétique
Le mouvement de fragmentation fabrique aussi les laissés pour compte de l’énergie – énergie qui conditionne également en partie la puissance d’exister. Dans sa magnanimité, le capital invente alors le chèque énergie (en 2018), qu’il conçoit bien évidemment comme une mansuétude de sa part. Mais c’est oublier l’histoire et les quelques présents qu’elle laisse à la postérité. Dans un passé pas si ancien, le système électrique ayant été nationalisé, il fut décidé que chaque habitant de ce pays pourrait bénéficier d’un minimum de fourniture électrique sans plus de formalités (afin de contribuer à l’égalité d’accès des habitants à la richesse nationale). Néanmoins, pour éviter les débordements excessifs de consommation (des « profiteurs » diraient les magnanimes), un fusible de 5 ampères limitait la fourniture à environ 1,2 kW (kilowatt). Un fusible ça « grille » facilement et ça oblige à surveiller de près tout dépassement, à chaque instant – faute de quoi on se ruine en achat de fusibles. Mais en théorie, avec 1,2 kW bien maîtrisé tout au long d’une journée, on dispose de 1,2kW x 24h = 28,8 kWh d’énergie. Cela ne ramène pas le climat de Nice à Saint-Étienne mais pour une petite cagna, cela permet de se chauffer un peu et de cuire son frichti (28kWh représentent près de 3 litres de fioul ou environ 6 kilogrammes de bois).
L’Histoire est faite d’évènements présents qui laissent des traces à la postérité [2]. Ne laissons pas une minorité écrire et retenir l’Histoire. Aujourd’hui est un présent qui se dissout dans demain. Demain est autre présent pour celui qui prend soin de ce cadeau qu’est le présent. En faisant vivre le cadeau, nous prendrons soin des présents collectifs conquis, quitte à les remodeler ou en inventer d’autres (un conquis à une échelle nationale est une protection libératrice à toutes les échelles locales, ne l’oublions pas en ces temps de localisme !).
Petit mode d’emploi du Linky à l’attention de ceux qui auraient besoin d’un peu d’électricité sans avoir à quémander le « chèque énergie »
Avec le Linky, plus besoin de fusible, c’est ce faux-compteur qui prend à son compte la fonction de limitation à 5 ampères. De ce fait il est désormais possible, pour celui qui en est équipé, de bénéficier de l’égalité d’accès sans même être abonné.
Par appuis successifs sur la touche « réarmement » (cf. l’illustration jointe), on accède à l’écran de puissance souscrite (1,25 KVA sans abonnement). Cette manœuvre n’est pas indispensable mais permet, sans explorer toutes les fonctions accessibles et secrètes de l’appareil, de se familiariser au baragouin des indications (pas inutile). Si le Linky n’est pas armé, on retrouve le symbole de contact ouvert au bas de l’écran. Un appui long (environ 5 secondes) sur la touche de réarmement rétablit le courant sur l’installation, sous réserve de ne pas appeler plus de courant que la limitation à 5 ampères (éteins les appareils avant la manœuvre, tu rebrancheras après [3]). Si une coupure est opérée à distance [4], il suffit alors de réarmer pour bénéficier à nouveau de 1,25 KVA.
Et ensuite ? Le pilote automatique du réseau électrique va s’apercevoir que ça consomme sans abonnement, cependant cela peut prendre un bon mois pour lui monter au cerveau et ce même s’il est informé tous les quarts d’heure (les agents, qui sont chaque jour sur le terrain, le savent bien, ils laissent filer). C’est là que le « chèque énergie » entrera en jeu. Le fonds qui alimente les chèques énergie provient d’une cotisation perçue sur toutes les factures d’abonné (environ 2,5 euros). Bien qu’abondamment alimenté par tous, les éventuels bénéficiaires de ce fonds n’y font que peu appel. Effectivement, pourquoi contraindre la dignité à demander l’aumône quand son dû a été durement conquis dans le passé ? La technique proposée ici permet d’obtenir ce dû sans le subordonner à l’humiliation.
Compléments d'info à l'article