6h
6 officiers de la bac frappent à la porte de la Bourse du Travail. Ils demandent d’ouvrir les grilles.
Une dizaine de camions de Police et quelques voitures de la bac bloquent la rue. Le barrage s’étire de la place du Peuple à la place Albert Thomas, des bus sont prévus pour remplacer les trams et la circulation est filtrée. L’opération est bien ficelée. Les personnes présentes en soutien à l’extérieur sont retenues derrière le rubalise de la Police.
6h30
Les solidaires à l’intérieur expliquent aux officiers de la bac qu’il avait été prévu de quitter pacifiquement les lieux avant 10h. On leur rétorque : « Il n’y a pas de dialogue possible ».
Une détachement policier cagoulé, armé, pénètre alors dans la Bourse du Travail. Les personnes hébergées se réveillent dans l’urgence, s’habillent comme elles le peuvent. Pendant ce temps, toutes les portes de la Bourse du travail sont enfoncées, le but étant d’empêcher toute sortie et de contrôler toutes les identités.
Une distinction est faite entre ceux-celles semblant français.e.s et militant.e.s et les exilé.s. Les familles sont recluses dans la salle de Conférence, un groupe d’hommes dans une salle du troisième étage. Aucun.e militant.e ne peut être présent.e pendant que les policiers effectuent des fouilles au corps.
L’interpellation, sans interprète, dure 2h au bas mot.
7h30
Après avoir été controlé.e.s, les personnes en soutien sont escorté.e.s à la porte côté Albert Thomas, où les attendent le cortège armé, et un grand nombre de militants.e.s venu.e.s en soutien.
8h
Les familles, femmes, hommes, enfants sont escortés au compte goutte côté Halles Mazérat. Même accueil. Toutes les personnes sont mises dehors, emportant avec elles ce qu’elles peuvent.
Quelques solutions arrivent du 115, pour certaines personnes. Il s’agit d’hébergements en hôtel pour une ou deux nuits. Nous patientons une heure dans le froid. Finalement on nous renvoie vers l’accueil de jour de Renaître. Nous voilà partis avec les enfants, une personne en fauteuil roulant, les quelques affaires sauvées, à travers Saint-Étienne, jusqu’à la Fontaine (accueil de jour).
Les matelas et couvertures sont évacués par les services de la mairie.
Nous avions reçu la veille un ultimatum : nous devions quitter la bourse à 9h et 77 personnes seraient relogées. Une liste avait en effet été établie par la Cimade cette semaine. Elle répertoriait les personnes ayant droit à un hébergement (individus en demande d’asile, familles en situation de fragilité liée à une maladie grave ou à la présence d’enfants en bas âge) et communiquée à la préfecture avec l’accord des personnes concernées. Cette liste a été établie pendant que l’expulsion était suspendue : il nous semblait qu’un dialogue commençait à se créer avec la Préfecture, qui s’est engagée hier à prendre ses responsabilités en proposant des hébergements à l’ensemble des personnes inscrites sur la liste. A aucun moment nous n’aurions pris le risque de perdre l’accès aux hébergements proposés aux familles. Mais une fois de plus une évacuation traumatisante n’a pas pu être évitée.
Les informations à 12h
Des logements continuent d’être attribués un par un, pour des périodes allant de quelques jours à une semaine (à Roanne ou à Saint-Étienne).
Les seules structures d’accueil pour les personnes non logées sont les structures habituelles de jour (La fontaine de 8h30-14h, Le bistrot social 15h-21h, Revivre pour personnes seules).
Pour ce qui est de cette nuit, nous n’en savons pas plus à cette heure.
Il semble utile de le rappeler : la majorité des personnes sont en cours de démarches administratives ou dans des situations extrêmes de vulnérabilité. Les services de l’État sont d’après la loi obligés de les loger.
Contrairement à ce qui est annoncé dans la presse ou par la Préfecture, beaucoup de personnes ne se sont toujours pas vu attribuer de solutions pour cette nuit. Nous espérons quand même que des hébergements seront proposés aux personnes qui ont pu rencontrer la Cimade et s’inscrire sur la liste cette semaine.
Aussi, à la suite de cette opération malhonnête, l’élan collectif appelle à un rassemblement à 15h30 place de l’Hôtel de Ville, afin de rappeler aux pouvoirs publics leurs devoirs, leurs responsabilités, et afin d’exprimer notre solidarité. Malgré l’annulation de l’événement « Cœur géant », montrons que nous avons du cœur, des valeurs, et que cela ne ferait pas de mal à nos élus.
L’application de la loi Asile et Immigration fait ses preuves : tri, déplacement des exilé.e.s, accélération des procédures. Une vraie politique de déportation déguisée et de répression des solidarités est en train de se mettre en place en France. Saint-Étienne n’est pas épargnée.
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