A vous visiteuses et visiteurs de la Biennale de l’ennui,
Nous ne sommes pas dupes, ne le soyez pas lors de votre passage touristique à Sainté. La biennale du design vend une ville qui n’existe pas et qui n’est pas la nôtre. Elle n’inonde en rien la vraie vie et n’est qu’une vitrine. Ce n’est pas avec un événement international que les stéphanois-e-s auront une plus belle vi(ll)e.
Parce que le design est l’outil privilégié de la gentrification locale et que la gentrification est avant tout un processus de dépossession. C’est la dépossession d’un territoire au détriment de ses habitant.e.s les moins fortuné.e.s et à l’avantage de nouvelles et nouveaux arrivant.e.s et propriétaires. Elle est le fruit d’un système de collusion entre les élu.e.s, les bureaucrates, les promoteurs et les investisseurs en quête de profits.
Notre ville ne sera ni la capitale des taudis ni celle du design. Parce qu’insalubrité et gentrification sont les deux versants d’un même processus. Laisser pourrir les quartiers permet de les transformer, et leur population avec. A Saint-Étienne comme ailleurs la culture sert de levier à ce processus. Ici, c’est le design qui a été choisi comme outil d’un marketing territorial décomplexé. C’est celui-là qui ignore les habitant.e.s déjà là et qui promet à celleux pas encore là un avenir radieux.
Le design est partout, il est en tous cas revendiqué pour défendre n’importe quel projet de transformation de la ville. Il sert les intérêts des privilégiés locaux, de la construction du centre commercial Steel à l’installation de micros dans nos rues qui ne seraient pas assez « Serenicity ». Les porteurs de ces projets ne prônent pas le bénévolat et attendent évidemment un retour sur investissement.
On nous fait croire que le design est là depuis toujours. Ce concept du futur est posé sur un passé qui l’ignorait. Non, la rubanerie n’était pas l’avant-garde du design.
Le design est à la mode. Il attire les branché-e-s en tous genres. Celles et ceux-là même qui donnent leur légitimité aux projets les plus répugnants croyant rendre « le monde plus habitable ». La biennale n’est pas un moment apolitique et neutre mais un événement orchestré qui nous fout la lourde.
Si vous ne souhaitez pas devenir complice d’un embourgeoisement de cette ville, votre engouement du moment doit s’arrêter ici. Notre ville n’est pas un terrain d’expérimentation pour jeunes créatives et créatifs, mais un territoire solidaire, populaire et révolté.
Le terrain d’entente prôné par cette édition n’existe pas et n’existera pas. Parce qu’on ne veut pas d’une société lissée ni d’une grande parade design consensuelle.
Des habitantes et habitants de Sainté.
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