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Publié le 17 mars 2006 | Maj le 19 janvier 2019

DADVSI : chronique d’un désastre


Billet de Tristan Nitot, co-fondateur et président de Mozilla Europe.
DADVSI, c’est la fin du peer to peer et de la copie privée.

Tout ce pour quoi je me suis battu, à savoir le droit à la copie privée, le respect du peer to peer en tant que technologie, le respect du logiciel Libre en tant que mode de développement efficace et en tant que chance à saisir pour l’Europe vient d’être piétiné.

Non, bien sûr, tout n’est pas perdu. On devrait pouvoir continuer à produire des logiciels Libres comme Firefox et Thunderbird, qui permettent pourtant de partager des fichiers protégés contre le droit d’auteur. Ce qui devrait nous sauver, ce sont deux adverbes flous. Tu parles d’une tranquillité d’esprit ! Je m’explique : En tant que président de Mozilla Europe, je suis passible de trois ans d’emprisonnement et de 300.000 EUR d’amendes pour le fait (je cite la loi) « d’éditer et de mettre sciemment et sous quelque forme que ce soit, un dispositif manifestement destiné à la mise à disposition du public non autorisée d’oeuvres ou d’objets protégés ».

Voilà . Avec Firefox, on peut télécharger des documents numériques par les protocoles HTTP et FTP. C’est le fonctionnement même du navigateur qui veut cela. Ces documents sont ils couverts par le droit d’auteur ? Dans leur immense majorité, oui.

Avec notre logiciel de messagerie Thunderbird, on peut envoyer des messages avec en pièce jointe une chanson au format MP3. C’est le principe même de la messagerie. La fonctionnalité de pièce jointe n’est pas arrivée par accident. On peut même raisonnablement dire qu’elle a été mise dans ce logiciel sciemment. Elle n’est pas, par contre, manifestement destinée au partage de musique illégale, et c’est ce qui nous sauve, du moins jusqu’à ce qu’un juge en décide autrement.

Un peu plus bas, on précise que ne sont pas concernés les « logiciels logiciels destinés au travail collaboratif, à la recherche ou à l’échange de fichiers ou d’objets non soumis à la rémunération du droit d’auteur ». Est-ce vraiment le cas de notre client de messagerie et de notre navigateur Web ? Qui peut me l’assurer ?

Alors je vous pose la question, chers lecteurs. Et je la pose aussi au ministre et à tous les députés qui ont voté cette loi, et je la pose aussi à mon confrère blogueur Maître Eolas, dont l’avis m’importe beaucoup :

Faut-il que j’aille me rendre au commissariat du 15° arrondissement ? ;-) Si oui, est-ce que cela va jouer en ma faveur et réduire ma peine ? ;-)

Plus sérieusement, est-ce que cela vaut le coup que continue à contribuer à du développement du logiciel Libre, qui donne à chacun l’accès au savoir, à la culture, à la communication, et même au commerce électronique ? Faut-il que je demande aux bénévoles qui participent au projet de près ou de loin, et font incidemment la promotion de la francophonie (FrenchMozilla, Geckozone, Mozillazine-fr, XULfr), d’abandonner le projet pour cause de risques juridiques encourus ?

A coté de cela, l’internaute qui télécharge illégalement de la musique risque 38 EUR d’amendes. Le prix de deux CD. Autrement dit, ça n’est en rien dissuasif, contrairement aux trois ans de prison et 300.000 EUR d’amende. (Le plus amusant, c’est que les 38 EUR vont dans les caisses de l’état, et pas du tout dans celles des artistes !).

Ce projet de loi DADVSI n’était pas un problème facile à résoudre, c’est certain. J’ai vainement tenté d’apporter ma pierre à l’édifice, en tant que simple citoyen. J’ai vraiment apprécié de voir que certains députés, de tous bords ont compris les enjeux et se sont battus dans l’hémicycle tant qu’ils ont pu. Mais la pression de l’industrie musicale a été trop forte, tout comme celle de l’OMC et de l’OMPI.

Le résultat, au delà des multiples bévues juridiques, politiques et de communication, est un texte de loi incohérent, rétrograde et dangereux, en plus d’être une occasion magistralement ratée de faire rentrer la France dans le 21e Siècle.

Il reste toutefois une lueur d’espoir : il faut faire passer le message autour de nous, du danger des DRM. Je m’inspire en cela de la phrase de Coluche : « Quand on pense qu’il suffirait que les gens ne les achètent plus pour que ça ne se vende pas ».

P.-S.


Proposé par dial
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