Quand on veut pratiquer le sport collectif et qu’on débarque dans une ville ou qu’on connaît pas grand-monde, c’est la solitude ou l’ambiance macho et « gagne-à-tout-prix » qui règne trop souvent dans les clubs « classiques » (en plus du coût des licences). J’en avais marre de traîner mes baskets trouées seul tous les dimanches aprem, et c’est là que je tombe sur cette affiche : « Street Basket – 23 octobre 2021 ».
Un petit coup de fil pour s’inscrire, et le tour est joué ; j’me pointe le jour J, la météo est au rendez-vous avec un grand soleil (rien à voir avec le projet de gentrification du quartier du Soleil de la Team Perdriau), et c’est parti pour un mémorable tournoi. Non pas que les dunks aient été particulièrement spectaculaires, ou le niveau de jeu digne des play-offs NBA, mais plutôt parce que pour une fois, tout le monde avait sa place. Pas de bip-bip à l’entrée, pas de remarques sur le talent des un.es et des autres. Des pizzas à prix libre, des matchs endiablés, des récompenses pour le moins suggestives – des ballons et des bombes de peinture. Chacun.e joue à son rythme, et une pause repas a même été décrétée en plein match suite à la concertation des opposant.es.
Ce genre d’événements, c’est l’occasion de se rappeler que nous n’avons pas besoin de la logique des fédérations « délégataires » [1], promptes à appliquer les consignes des gouvernements autoritaires. C’est l’occasion de se rappeler que l’ambiance sur les terrains partagés par tous.tes n’est pas obligée de rester excluante ou oppressante, et que pour cela, il nous faut continuer à multiplier ces moments de sport, d’accueil et d’auto-éducation. Restez attentifs aux affiches dans la rue : le moindre rayon de soleil peut-être l’occasion de remettre le couvert.
Derrière cet événement, un collectif qui taira son nom et son nombre et préférera se définir comme un ensemble de personnes diversement genrées, racialisées et socialisées, issues du quartier mais pas que, politisées en tout vas et désireuses de faire bouger les lignes des discriminations et de la gentrification rampante.
Pourquoi jouer au basket à l’américaine ?
Tout d’abord, parce que nous aimons le basket et que le sport est une manière différente de se réunir, d’occuper l’espace public, de sortir de notre environnement politique et de proposer des activités plus inclusives avec les habitant·es du quartier où nous vivons. Proposer des activités sans restrictions sanitaires. Proposer une activité revendiquée sans pass, anti-sexiste (mixité totale des groupes, de genre mais aussi d’âge, de capacités, etc.) et anti-raciste, c’est remplir l’activité d’un sens politique clair, c’est-à-dire dire « ce sont nos combats, ce sont nos drapeaux ». Et c’est avec eux que nous voulons fonctionner, nous ne sommes pas l’élite politique, nous sommes des gens du quartier qui voient la gentrification qui avance et l’état qui ferme de plus en plus la porte aux jeunes, les exclut et les criminalise, surtout dans ce parc.Pourquoi le Street basket ?
Le street basketball est né dans les années 70/80 dans les ghettos de New York et ceux qui le pratiquent sont des jeunes qui survivent aussi à la dégradation de leurs quartiers, aux mains des promoteurs et des dealers immobiliers. Ils jouent mais ils luttent aussi contre le racisme et la stigmatisation. Dans les tribunes des terrains de basket, la culture hip-hop commence à naître. Ils sont jeunes, nous sommes jeunes, plein d’idées et de rêves qui survivent à un monde qui tente de les enfermer. D’autre part, le basket-ball professionnel est le sport qui a le plus pris position contre le racisme et les violences policières ces dernières années.Nous croyons à la construction sociale de la communauté avec tous ses acteurs·trices.Nous croyons qu’il faut élargir nos possibilités et non les limiter.Nous savons que les endorphines que le sport génère en nous sont les meilleures !Nous savons que nous devons occuper les espaces publics pour mener une vie digne et saine.Nous savons que nous devons gagner de l’espace à la droite raciste, car nous savons que le fascisme avance si nous ne le combattons pas !Rendez-vous dans les rues !
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