Samedi 23 décembre, l’armée turque a intensifié ses opérations sur le Rojava suite à une offensive de la guérilla du HPG (Forces de Défense du Peuple) ayant occasionné de nombreuses pertes dans les rangs de l’armée turque au Bashur. Les bombardements ont ciblé les infrastructures civiles de la région dans plusieurs villes, faisant pour le moment 8 mort.es et 18 blessée.s.
L’institut Andrea Wolf de l’académie de Jineolojî a rédigé ce communiqué pour dénoncer les attaques de l’État turc, rendre hommage aux martyrs et appeler à “s’organiser contre le fascisme, l’occupation et le patriarcat”.
Nous sommes aujourd’hui le 25 décembre.
En ce moment même, on entend dans l’air les sons des avions de guerre.
Aujourd’hui, l’attaque turque contre l’imprimerie Simav à Qamishlo a tué Berivan et cinq autres employé-e-s. Ala El Sebawi a également perdu la vie lors de l’attaque turque d’une boulangerie publique. Berivan et Ala sont deux jeunes femmes du Rojava qui ont lutté pour se construire une autre vie. Avant la révolution, les femmes n’étaient pas autorisées à faire leurs propres choix de vie. A l’heure actuelle, nous savons que Riyad Hemo, Hisên Ehmed, Rênas Hisên, Ferhan Xelef et Ferhan Temê ont également perdu la vie et que d’autres ont été blessé-e-s.
A chaque endroit frappé par la Turquie, pour chaque personne perdue, des souvenirs durables ont été perdus : des souvenirs sur la façon de faire la révolution et de construire une nouvelle vie.
D’autres lieux ont également été visés par la Turquie : dans le centre d’Amude, c’était la coopérative populaire qui produisait des olives. Nous nous souvenons d’une femme d’Afrin qui disait : « Ici, quand je suis avec les olives, je me sens plus proche d’Afrin – et cela m’apporte de la joie ». Il est important de savoir que pour les habitant-e-s d’Afrin, l’olivier est sacré, considéré comme une source de vie. Aujourd’hui, leurs oliviers sont coupées, extraits par les mercenaires turcs. « Chaque fois qu’ils coupent un olivier, disent-ils, ils tuent l’un-e d’entre nous. Depuis le début de l’occupation d’Afrin, beaucoup de nos aîné-e-s d’Afrin meurent au moment de la récolte des olives. Nous savons que ce n’est pas une coïncidence ».
La Turquie a frappé un autre endroit aussi : le hall de Karama à Amude. Nous nous souvenons de l’époque où l’organisation des femmes, Kongra-Star, y avait tenu son congrès, célébrant la révolution des femmes. Des centaines de femmes de tous âges étaient présentes. Pour les habitant-e-s d’Amude, c’est un espace de rencontre bien connu pour des réunions publiques.
Parmi les nombreux autres lieux, la Turquie a ciblé le centre de dialyse de Qamishlo. Récemment, des discussions avaient eut lieu sur comment construire d’avantage d’alternatives pour les personnes malades de la région. Car en effet, ce centre était le seul à offrir un service public.
Même depuis le moment où nous avons commencé à rédiger cet appel, les informations sur des nouvelles attaques augmentent de façon exponentielle. Les infrastructures visées dans toutes les régions du Rojava comprennent des hôpitaux, des sites et dépôts médicaux, des sites d’approvisionnement en nourriture, des usines textiles, des stations-service et des puits, des coopératives agricoles, des bâtiments et des installations de dépôts et de moulins à grains.
En attendant, les peuples du Rojava n’ont pas cessé leurs efforts pour s’organiser selon les principes du paradigme démocratique et écologique basé sur la libération des femmes. Ils ont reconstruit leur vie sur les ruines de la guerre.
Dans une région marginalisée, opprimée par le régime d’Assad pendant des décennies et dotée d’une infrastructure très limitée, des usines ont été construites, ainsi que des ateliers et des coopératives pour produire des biens de première nécessité. Des écoles ont été construites, des académies pour que chacun-e puisse apprendre dans sa langue maternelle. Des imprimeries ont été construites afin de partager librement des analyses, des romans et des poèmes. Des hôpitaux ont été construits pour soigner les personnes malades. Des lieux de rencontre et de fête ont été construits. Pour répondre aux besoins énergétiques, des stations pétrolières ont été prises en main. Chacun de ces éléments a été construit grâce aux efforts sans relâche de personnes organisées en communes, conseils, coopératives et académies pour honorer l’espoir et affirmer une volonté de vivre. Ce sont là les résultats concrêts de l’espoir que nous pouvons construire une vie libre sans dépendre de l’État, du capitalisme et du patriarcat.
Les succès les plus récents du mouvement de liberté kurde menacent l’existence de l’État fasciste turc. Le 13 décembre, l’Administration autonome démocratique du nord-est de la Syrie a déclaré son nouveau contrat social. Le 19 décembre, les partis kurdes ont obtenu la majorité des sièges lors des élections locales à Kirkouk, en Irak. Par ailleurs, la guérilla a mené des actions victorieuses contre l’armée d’occupation turque dans les montagnes du sud du Kurdistan (Irak).
C’est pourquoi l’armée turque intensifie – une fois de plus – ses attaques contre le Rojava en vue de réaliser son rêve d’un empire néo-ottoman.
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