Ce qui a gêné, d’emblée, c’est la glorification de l’acte en lui-même, sans chercher à comprendre quelles étaient les motivations de l’auteur. Cela a largement continué dans l’imaginaire des tags posés hier (acte IX), qui reprenaient allègrement le mythe du « héros » casseur de poulets, parfois jusqu’à la dérision memique. Soyons honnêtes, la plupart d’entre nous baignons plus ou moins dans le culture dite « riot porn ». La police est chargée de protéger l’ordre présent du monde, et nous voulons le défaire. Nos forces sont réduites, alors que l’exploitation salariale, les dominations sexistes, racistes, spécistes, validistes, hétéros (etc.) sont banales, parce qu’institutionnalisées et surtout profondément ancrées dans les mœurs. Le fascisme gagne du terrain chaque jour, alors que la planète commence à cramer sérieusement. Le désespoir est de mise pour toute personne un peu lucide devant la situation. Alors voir des flics qui prennent cher, il est certain que ça apaise au premier abord.
Mais la fascination qu’exerce la violence spectaculaire sur les militant.e.s pose ici problème. Ce n’est pas la violence d’une action qui détermine sa radicalité. Ça a été répété pas mal de fois, « tout ce qui bouge n’est pas rouge », qu’on aime cette couleur, qu’on lui préfère le noir ou qu’on mélange les deux. Dès le début du mouvement, des groupes de « l’ultra-droite » sont justement venus faire le coup de poing dans les manifs. À Paris, on a pu voir les Zouaves, les royalistes, d’autres nationalistes et ex-gudards dans la mêlée, à exécuter les gestes qu’on réservait, à tord, à « l’ultragauche ». Le sens que les personnes donnent à leurs actes prime, avant le degré de violence employée. La preuve, c’est que les Zouaves ce sont aussi fendu d’un soutien au boxeur, avec un « patate de forain » (chanson du rappeur Seth Gueko) qu’on retrouvera aussi sur une banderole d’un cortège de tête hier.
(illustration : Roland Topor)
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