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ESPAGNE  
Publié le 22 juin 2005 | Maj le 13 décembre 2020

[20 mai 2005] Un enseignant d’une université espagnole censuré pour avoir défendu les réseaux P2P


Voici ce qu’il m’est arrivé alors que j’essayais de défendre les usages légaux des réseaux peer-to-peer (P2P) en Espagne.

Depuis plus de cinq ans maintenant, je donne un cours sur, entre autres, la « propriété intellectuelle » (bien que je n’aime pas ce terme), au sein d’un parcours de Master à l’Université Polytechnique de Valence (UPV). Il y a deux semaines, il était prévu que je donne une conférence (sur invitation du syndicat étudiant ETSIA et d’un groupe d’utilisateurs de Linux, à l’occasion de la « Semaine de la culture » dans l’un des bâtiments de l’université.

Pendant cette conférence, je devais analyser les usages légaux et les avantages des réseaux P2P, y compris dans le cadre d’œuvres protégées par le droit d’auteur (usages en accord avec la loi espagnole sur la propriété intellectuelle, l’exception de copie privée, ainsi que de nombreux travaux de recherche, livres et décisions de justice). J’avais même l’intention d’utiliser le réseau afin de « prouver » que ces usages sont légaux, puisque des membres de la société de perception des droits d’auteur SGAE avaient déclaré sans sourciller à la télévision et dans les journaux que « les réseaux P2P sont illégaux » (sic). Dans cette optique, j’avais même contacté la SGAE, la police nationale et le procureur général pour les informer de ma conférence.

La veille de la conférence, le Doyen de l’université (sous la pression de l’association de l’industrie espagnole du disque « Promusicae », comme je l’ai découvert plus tard, et comme il l’a reconnu lui-même dans le quotidien national El Paà­s, et même sous la pression de l’association américaine de l’industrie cinématographieque MPAA, comme l’indique un autre journal) a essayé d’empêcher la conférence en nous retirant la permission d’utiliser le local préalablement retenu. J’ai donc demandé une deuxième salle, qui a été refusée également. Même chose pour la troisième. J’ai finalement donné ma conférence à la caféteria de l’université, pendant cinq heures, devant 150 personnes.

Un peu plus tard le jour-même (le 4 mai, je ne l’oublierai jamais), j’ai reçu un coup de fil du responsable des programmes de Master de mon université, qui m’a annoncé que le Doyen de l’université l’avait appelé et lui avait demandé de « s’assurer que je n’enseignerai plus ici » ; puis, un deuxième appel de ce même responsable pour me dire : « c’est ton choix, c’est toi qui en portes la responsabilité ».

Le directeur m’a ensuite appelé et m’a d’abord demandé de retirer de mon site personnel tout lien vers celui de l’université, et de « cacher » le fait que j’enseignais là -bas. Puis, il m’a parlé des pressions et des menaces dont l’université et lui-même avaient fait l’objet (inspections sur les licences logicielles, les violations de droits d’auteur, ou toute chose susceptible de leur causer du tort). De toute évidence, il me fallait démissionner pour sauver son emploi (ainsi que celui de tous les intervenants en Master). J’ai donc démissionné.

Mais même après ma démission, quand les média (qui commençaient à s’intéresser à cette affaire, comme vous pouvez le voir dans les liens ci-dessous) ont appelé l’université, le vice-doyen responsable de la communication a eu le culot de dire que je « n’ai jamais été professeur dans cette université », et que je « n’avais fait cours qu’à quelques classes ». Bien sûr, je n’étais pas Professeur d’université (ce que je n’ai jamais prétendu être), mais j’y ai enseigné plusieurs matières pendant plus de cinq ans !

Le plus important n’est pas que j’ai perdu mon travail, bien que les notes que j’ai obtenues dans le questionnaire de satisfaction des étudiants soient les plus élevées de tout le parcours de Master, et que je n’ai jamais enfreint aucune règle, aucun contrat, aucun règlement. Ça ne me gêne pas non plus de ne jamais avoir reçu le moindre coup de fil direct de la part de personnes désapprouvant mes idées ou ma manière de faire. Ce que je regrette le plus, c’est d’avoir été censuré à l’intérieur de ma propre université (dans un pays membre de l’Union européenne de surcroît !), et cela à cause de pressions et de menaces émanant de sociétés de gestion des droits d’auteur, et d’associations de l’industrie du disque et de l’industrie cinématographique
(vous trouverez les preuves de tout cela sur mon site web).

Quand allons-nous donc réagir ? Nous ne pouvons pas les laisser imposer leur mauvais modèle économique, dépassé et inefficace, par des menaces, des pressions et la loi du silence. Nous devons briser ce silence. Je suis prêt à parcourir le monde (comme je le fais actuellement en donnant des conférences à travers l’Espagne) pour raconter mon histoire, et ils ne m’obligeront pas au silence. La vérité doit être connue. Mais pour cela j’ai besoin de votre aide.

Cette histoire a déjà été couverte par plus de 400 blogs espagnols, radios nationales, magazines et journaux. Mais personne ne semble la connaître hors d’Espagne. Pourriez-vous, s’il vous plaît, m’aider à la faire connaître par-delà ses frontières ?

Si vous avez besoin d’informations complémentaires, n’hésitez pas à me solliciter.

Bien amicalement, et, d’avance, merci beaucoup.

Jorge Cortell jorge chez cortell.net
http://jorge.cortell.net

P.-S.

Traduction collective de www.Framasoft.net


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