Nous étions plusieurs à dormir, d’autres préparaient le petit déjeuner quand l’ESMAD prît d’assaut notre campement« explique Colombia Informa, un leader d’une communauté afro qui préfère taire son nom par peur des représailles. »Pour la journéee d’hier, on avait prévu une interlocution avec le gouvernement départemental mais on nous a coupé les lignes téléphoniques et nous n’avons plus pu communiquer.
Aujourd’hui, nous avons décidé de discuter avec le maire quand nous avons entendu l’attaque de l’ESMAD contre le campement où nous étions tous, avec des enfants et des femmes enceintes.
Les communautés afros et autochtones de la région se mobilisent depuis plus de 10 jours dans le cadre d’une action appelée Minga Interéthnique, exigeant une réponse de l’Etat aux multiples réclamations dont l’application concrète de droits à la santé, à l’éducation, et l’éclaircissement de cas de corruption dans la gestion municipale. « Nous revenons exiger des garanties et le rétablissement des personnes qui se sont faites expulser par les groupes paramilitaires ».
Le 17 novembre, avant le début de la Minga, au moins 6 personnes avaient dénoncé des menaces de mort pour que soit annulée la mobilisation sociale.
Selon des témoins, le maire aurait averti : « Ne participez pas à la mobilisation sinon les paramilitaires vont vous tuer. »
L’ESMAD, muni de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes a, selon des témoins, visé 8 autochtones aux visages et aux têtes.
« Il y avait au moins 12 enfants de moins de 8 ans et une dizaine de femmes enceintes » dénonce un participant.
MANIFESTATION À DURÉE INDÉFINIE
Malgré la répression, les communautés déclarent continuer la lutte : “pour la vie, le territoire* de Alto Baudó, nous déclarons la Minga Inter-éthnique indéfinie” ont annoncé les communautés.
*NdT : le sens de Territoire en Colombie porte plus sur le fait que les terres habitées par des communautés qui font vivre cet espace. Le sens porte moins sur les frontières que sur l’importance de l’enracinement des communautés.
A NOTER CETTE SEMAINE : DEUX AUTOCHTONES TUÉ-E-S À CORINTO DANS LE CAUCA
Berta Julian et son époux Jairo Apio, ont été tuéEs par une camionnette blanche appartenant supposément aux paramilitaires.
Il faut rappeler que le site internet ACIN et le conseil communautaire autochtone de Corinto a dénoncé il y a quelques jours que des récompenses seraient octroyées par les paramilitaires à toute personne tuant un autochtone du conseil communautaire et un « major » c’est-à-dire un ancien, pouvant être un guérisseur, en tout cas ayant une grande connaissance de la culture autochtone orale.
Berta et Jairo participaient touTEs deux activement à la vie communautaire de Corinto, aux mingas et à la libération de la terre qui a lieu depuis le 16 décembre 2014.
UN LEADER AFRO INCARCÉRÉ
Un leader afro de la Cumbre Agraire (sommet constitué de paysans de diverses factions, d’autochtones et d’afros), Emigdio Pertuz, logeant à l’hôtel apprêté pour l’occasion par le gouvernement aux membres de la Cumbre, se fit arrêter dans sa chambre.
Il est accusé de délit en réunion, de dommage ambiental alors que Emigdio dit ne posséder aucune mine artisanale.
Il sera défendu par le Comité de soutien aux prisonnierEs politiques.
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